Définir un plan de développement commercial

Dans tous les secteurs d’activité, l’action commerciale est devenue une nécessité absolue. Pour autant, il n’est pas simple de donner des objectifs commerciaux à son entreprise et aux personnes en charge de la fonction commerciale. Quelques conseils.

1. Réaliser un audit de ses besoins, de ses moyens (matériels et financiers) et de ses ressources humaines

Pourquoi ?

Avec un point mort comptable identique, si vous avez peu de compétences commerciales et une trésorerie tendue, leviers d’action et objectifs ne seront pas les mêmes que si vous avez un gros matelas en banque et une équipe de commerciaux compétents. Tout simplement.

 

2. Fixer un objectif stratégique d’inspiration SMART en fonction de l’audit

Pourquoi ?

Les objectifs motivent l’action. Un objectif SMART est :

  • Spécifique : son obtention dépend de l’entité qui porte l’objectif,
  • Mesurable : les résultats sont mesurables et il est possible à tout moment de comparer la situation présente et l’objectif,
  • Ambitieux : un objectif pas assez ambitieux ne sera pas assez motivant,
  • Réaliste : car l’objectif doit rester atteignable,
  • Temporisé : l’objectif doit comporter des bornes temporelles.

Toutefois, attention, un objectif SMART reste une vue de l’esprit. Dans l’expression « fixer un objectif », tout est dit : l’objectif est vu comme une destination immuable, absolue. Or, lors d’une soirée professionnelle, en écoutant le nouveau président du SCO Angers s’exprimer sur sa carrière et son nouveau statut de président, j’ai réalisé qu’il avait une approche glissante de ses objectifs… ce qui paraît incompatible avec des objectifs « fixés ».

Et les 150 chefs d’entreprise présents dans la salle ne s’en sont pas offusqués.

Objectifs glissants : qu’est-ce que c’est ?

Un objectif permet de donner un sens et une motivation à des actions. Donner des objectifs est un acte stratégique et managérial, c’est un fait. Et si l’objectif est atteint plus vite que prévu, doit-on s’arrêter ? S’il n’est pas atteint, que fait-on ? Un objectif glissant est un objectif que l’on adapte au fur et à mesure de l’action, pour tenir compte des évolutions d’un environnement complexe. L’objectif glissant permet de réagir sans attendre l’échéance temporelle.

Car le SMART reste une utopie

  • Fixer un objectif ambitieux, c’est très facile.
  • Fixer un objectif réaliste est plus compliqué, mais c’est faisable, il suffit généralement de réduire ses ambitions.
  • Fixer un cadre temporel à cet objectif, cela se fait sans problème, c’est une négociation sur une date.
  • Le « Mesurable » est déjà plus complexe, car tout ne se mesure pas de façon objective. L’outil de mesure risque d’être sujet à de longues discussions.
    Quant au « Spécifique »… Ce critère doit permettre au manager d’évaluer la performance individuelle de son collaborateur. Pour cela, le résultat qui sera confronté à l’objectif ne doit pas être influençable, ni positivement, ni négativement, par l’environnement.

Exemples :

– Donner un objectif de CA à un commercial dépend en grande partie de son propre travail (même si c’est toujours contestable…), c’est (à peu près) spécifique,

– Donner un objectif de satisfaction clients à un commercial dépend de la qualité des équipes qui réalisent les prestations ; si le commercial n’a aucun lien managérial avec ces équipes, l’objectif n’est pas spécifique.

En réalité, aucun objectif ne peut être 100 % spécifique : personne ne peut avoir la prétention de maîtriser totalement l’environnement. Un objectif dit SMART n’est donc jamais si SMART que cela : il reste une zone de flou, qui nécessite une adaptation en temps réel. Le SMART est une utopie. CQFD.

Agir en PME ou exister dans une grande entreprise ?

Lors d’une intervention dans une école d’ingénieurs, les élèves en première année ont réalisé différents ateliers pour appréhender les typologies d’entreprises. J’ai été frappé par leur maturité professionnelle. Ils ont synthétisé la différence entre travailler en PME et travailler dans une grande entreprise de la manière suivante :

– Dans une grande entreprise, il faut exister,

– Dans une PME, il faut agir.

C’est dur comme constat, mais assez vrai.

Le rapport avec les objectifs ?

Pour exister au sein d’une grande organisation, cela ne peut se faire que de façon relative, par rapport aux autres. Les tableaux de bord, avec objectifs dits SMART, permettent un classement et une communication sur ce classement. Si un objectif n’est pas atteint, la question qui viendra sera « pourquoi ? », question qui amènera comme réponses de nouveaux tableaux de bord, des explications, des justifications, mais pas nécessairement l’obtention de résultats.

Pour être acteur dans une organisation, c’est la « vitalité » investie par l’individu qui compte, et ce n’est pas mesurable. La relation humaine prime donc les objectifs sont plus souples, car peu mesurables. Si un objectif n’est pas atteint, la question qui viendra sera « comment faire pour avancer ? », avec comme réponse possible une révision de l’objectif. La PME n’a que peu de contrôle sur son environnement et elle n’a pas les moyens d’attendre pour réagir.

Dit autrement, tout cela a un rapport avec le regard de l’autre : pour exister – et faire progresser sa carrière ! – il est de bon ton d’objectiver le regard de l’autre, même si c’est très hypocrite, et tout doit être mesurable. Celui qui ambitionne d’être acteur pour faire progresser l’organisation sait que tout ne peut pas être mesuré et que le regard des autres peut rester subjectif.

Les méthodologies mises en œuvre dans les grandes entreprises sont souvent une source d’inspiration pour les PME, mais elles doivent être adaptées. Le management par objectif, notamment pour les commerciaux, fait partie de ces méthodologies utiles aux PME. Toutefois, une application pure et simple conduirait à alourdir l’organisation qui doit rester agile et réactive. C’est pourquoi je préconise la mise en place d’objectifs glissants d’inspiration SMART, mais sans absolutisme… car je préfère l’action à l’existence !

Cet objectif stratégique donne une direction à suivre, plus ou moins précise, donc plus ou moins floue.

 

3. Définir ses Plans d’Actions Commercial et Marketing

Pourquoi ?

Ils permettent de transformer les objectifs stratégiques en un enchaînement tactique qui permettra (normalement) d’atteindre ces objectifs. Ils définissent la zone de chalandise, le type de clientèle visé, la manière d’aborder les prospects, les outils commerciaux et marketing utilisés, les nombres de rendez-vous par cible, …

En synthèse, PAC et PAM répondent à la question « comment faire pour aller dans la direction de mon objectif stratégique ? » Ils définissent également les objectifs opérationnels.

 

4. Surveiller ses objectifs opérationnels

Pourquoi ?

Les plans d’actions permettent de se projeter dans le temps. C’est une étape finalement assez plaisante… Encore faut-il les confronter au terrain et à la dure réalité.

En assurer la réalisation, c’est beaucoup plus laborieux, et avec le « nez dans le guidon », les actions simples, récurrentes, peuvent être oubliées, au profit des urgences du quotidien. C’est une cause majeure d’échec.

Les objectifs opérationnels – nombre de visites de prospects, CA devisé, … – permettent d’établir un tableau de bord de rappel à l’ordre.

Tableaux de bord : une nécessité pour piloter

Aux débuts de l’informatique, j’étais gamin, et je jouais à une simulation de pilotage d’un sous-marin. Pilotage ? Conduite à l’estime, plutôt… Et tout le plaisir tenait à la réalisation de missions complexes, sans visuel, avec juste un radar et d’angoissants Biiiiiiiip-bip – Biiiiiiiip-bip – Biiiiiiiip-bip. Le jeu s’appelait GOTO.

La conduite à l’estime est valable dans un océan peu encombré, où les dangers sont éloignés, où nous avons le temps de réagir. C’est impossible dans un environnement chargé et mouvant, où les temps de réaction avant le choc sont très courts.
Les entreprises en général, celles du Bâtiment en particulier, sont parfois pilotées à l’estime, comme des sous-marins. Et malheureusement, certaines percutent des montagnes immergées parce que leur radar est inopérant : c’est la marque d’un manque d’indicateurs.

Quels indicateurs pour piloter ?

Bonne question.

Infinité de réponses ! Tant les caractéristiques de l’entreprise influençant ce choix sont nombreuses :

  • sa taille,
  • les différentes fonctions assurées,
  • son organigramme,
  • ses marchés,
  • sa structure financière,
  • ses projets,
  • ses temps de réponse,

Un bon consultant saura définir le bon dosage homéopathique et la hiérarchie des indicateurs. Ni trop, ni pas assez.

Trop d’indicateurs tuent l’indicateur

Pourquoi homéopathique ?

Un indicateur est un élément de décision parmi d’autres : le fantasme du logiciel de prise de décisions automatisée est révolu. Le chef d’entreprise doit recouper ses informations, mais sans se laisser submerger.

Une raison à cela ? Je le redis, le SMART est une utopie. Tout n’est pas mesurable objectivement.

Une autre raison ? S’il y a trop d’indicateurs, l’analyse n’est plus possible. Chaque information participe alors à un brouhaha indescriptible, un « bruit blanc » sans intérêt.

Une dernière raison ? Les indicateurs ont un coût d’obtention qui peut être exorbitant, c’est un investissement qui, s’il est prioritaire, se fera au détriment d’autres activités de l’entreprise. D’ailleurs…

Trop d’indicateurs tuent l’économie…

A doses homéopathiques, les indicateurs sont positifs, mais à haute dose, ils deviennent toxiques non seulement à l’échelle de l’entreprise, mais aussi à l’échelle de l’économie. Car ces indicateurs à outrance sont en partie la cause de la crise financière et du désengagement des jeunes en entreprise, ces soi-disant travailleurs ingérables. Pour vous en convaincre, lisez cette critique du livre Le Travail Invisible de Pierre-Yves Gomez.

Pour l’auteur, le travail présente trois composantes :

  • Une composante subjective : quel est le sens donné à notre travail, quelle est son utilité ?
  • Une composante objective : quelle est la performance (mesurable) de notre travail ?
  • Une composante collective : en quoi sommes-nous dépendants du travail des autres dans notre performance, quel lien social appelle-t-il ?

Le déséquilibre de l’une de ces composantes est néfaste. Et clairement, nous vivons dans une société où le travail objectif est hypertrophié au détriment des deux autres.

Un secteur spécifique : le Bâtiment

En PME, il faut agir.

C’est particulièrement vrai dans la culture Bâtiment. A tel point que les tableaux de bord et les indicateurs ont souvent mauvaise presse dans les PME et TPE du secteur.

Et cela tient probablement, au-delà de l’action, à l’existence d’une véritable culture métier et d’une communauté fière de son activité, qui a résisté pendant des années à l’hypertrophie du travail objectif.

La notion même d’Ouvrage présente une connotation beaucoup plus positive, chargée de Sens, que le terme Produit.

Ouvrage : résultat du travail d’un artisan

Tâche : réalisation d’un ouvrage dans un certain temps, pour un certain prix

(source Wikipédia)

La Tâche est ainsi le pendant objectif de l’Ouvrage, qui a une portée plus subjective.

Quant à la notion de Corps d’Etat, elle porte à elle-seule l’importance du Collectif dans la construction : difficile de faire un bâtiment tout seul…

Et ces spécificités révèlent une opportunité extraordinaire !

Ce secteur, victime de la Crise, n’a pas (complètement) oublié le Sens donné à son travail ni l’importance du Collectif. Pour échapper à la financiarisation (et à la Crise ?), il lui « suffit » donc de suivre deux voies :

  1. introduire un peu de travail objectif pour rééquilibrer les trois composantes, remettre – sans excès – de la Tâche là où il n’y a que de l’Ouvrage,
  2. valoriser sa spécificité culturelle qui met du Sens et du Collectif dans l’Ouvrage, et pas seulement de la Performance.

 

5. Analyser les écarts entre objectifs et résultats

Pourquoi ?

Personnellement, je raisonne en mode campagne. Je ne fais pas du commercial, je lance une campagne commerciale, d’une durée prédéfinie, pour laquelle je vais tirer un bilan – et donc des améliorations pour la campagne suivante !

C’est la Qualité appliquée à la fonction commerciale…

Si les résultats ne sont pas à la hauteur, cela permet de recaler les actions à engager.

Si les résultats sont là, c’est l’occasion de redéfinir des objectifs plus ambitieux !

 

Si vous avez besoin d’aide, nous pouvons vous aider sur l’une ou l’autre – voire toutes ! – de ces cinq étapes : n’hésitez pas à nous contacter.